JOUR 7 > ISFJORD : PÉNINSULE DE BOHEMAN, MINE DE RIJPSBURG
- Eric Poulhe
- 6 août 2015
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 13 avr. 2020
La navigation du jour est prévue autour de la péninsule de Boheman, un paysage typique de toundra polaire. Le premier arrêt nous permet une petite randonnée sur la toundra avec l’ascension du point culminant. En haut, le panorama à 360° nous offre une vue arrière sur la toundra avec au loin le glacier Svea, et de l’autre côté, juste en-dessous de nous, le cap de Boheman que nous contournerons un peu plus tard dans la journée.
A l’approche du cap, nous longeons des petites falaises, avec des blocs calcaires empilés un peu comme des livres à plat, dans lesquels se trouve du charbon visible à l’œil nu.
Une fois le cap franchi, nous nous dirigeons directement vers la mine désaffectée de Rijpsburg. L’approche du site par la mer est assez énigmatique. Le temps brumeux que nous avons maintenant, ajoute une atmosphère pesante et inquiétante. La mine a été abandonnée en 1921 par les Hollandais, derniers occupants du site, qui ont laissé les bâtiments dans leur état au moment de leur départ. Le temps a fait son travail de sape pour le plus grand bâtiment dont la toiture s’est effondrée certainement sous le poids de la neige. En revanche, la baraque qui servait de lieu de vie et de dortoir, est en parfait état de conservation. Des trappeurs et certainement des randonneurs comme nous, se sont chargés de l’entretenir et de remplacer certains ustensiles de cuisine usagés. Les parois verticales au niveau des couchettes en bois sont encore tapissées de vieilles affiches à moitié déchirées dont les couleurs ont pâli. On peut encore parfaitement distinguer les couvertures de magazine de l’époque ou les affiches de femmes du début du siècle dernier légèrement vêtues, qui devaient entretenir les fantasmes de la gente masculine.
En déambulant de pièces en pièces, se dégage une drôle d’impression de violer une intimité, en craignant d’être surpris par les mineurs rentrant d’un moment à l’autre de leur journée de travail. Ce lieu est clairement chargé d’histoire qu’on ressent même près d’un siècle plus tard.
L’atmosphère à l’extérieur, avec une légère brume, est encore plus pesante. Une chaloupe éventrée et une ancre de marine sont posées là, et renforce cette ambiance inquiétante.
Même si nous nous doutons où elle se situe, l’entrée de la mine est introuvable. Elle a certainement dû être obstruée, ou s’est peut-être effondrée avec le temps.
A l’écart des installations, se trouvent trois éléments quasiment alignés qui témoignent de la présence puis de l’extinction humaine. Le puits est encore en parfaite conservation, juste recouvert d’une grille protectrice. Un peu plus haut se trouve un cairn qui devait être un point de repère pour les bateaux ou les visiteurs venant par la terre. Et juste un peu plus loin se trouve une croix avec la gravure illisible du nom d’un ancien mineur qui doit reposer quelque part en dessous. Autant dire que la vision de tout ça n’est pas très encourageante. On n’ose imaginer ce que les mineurs avaient à endurer au quotidien en période d’hivernage, psychologiquement et physiquement, dans un lieu hostile aux conditions de vie si rudes.
Après cette visite qui nous remonte dans le temps, nous quittons Rijpsburg en direction du glacier Bore. Les vagues se sont formées dans notre dos et je m’amuse à les surfer. Nous nous arrêtons sur les moraines de Bore afin d’installer le bivouac. Le montage des tentes sur une plateforme très rocailleuse se révèlera finalement très confortable.
Durant mon tour de garde, j’aurai le bonjour d’un phoque qui croisera non loin du rivage dans ma direction, certainement intrigué par ma présence. Il repartira ensuite tout aussi calmement en glissant doucement à la surface plane de l’eau du fjord.
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