JOUR 4 > FJORD ECKMAN : GLACIER SEFSTRÖM
- Eric Poulhe
- 3 août 2015
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 13 avr. 2020
Le départ de l’île de Cora se fait par un temps ensoleillé magnifique sur un fjord complètement lisse. La lumière est exceptionnelle. Le panorama est digne d’un décor de carte postale. Les montagnes environnantes, alternant des strates sédimentaires aux couleurs ocres rose, beige ou grise, se reflètent à la surface du fjord comme dans un miroir. Les seules vagues que l’on rencontre sont celles créées par les kayaks qui glissent sur l’eau avec élégance. On souhaiterait que ces moments de navigation magiques durent éternellement, tellement c’est beau.
Nous contournons l’île de Cora par le Nord et croisons un bateau qui dépose un groupe de quatre personnes en combinaison étanche, a priori des scientifiques de l’UNIS. Nous prenons dès lors la direction du glacier Sefström et pagayons dans une eau de couleur ocre brique intense. A l’approche du glacier, la couleur de l’eau devient subitement grise créant une ligne de démarcation distincte. Nous croisons nos premiers icebergs.
Notre pause déjeuner est prévue sur le flanc du glacier avec une vue directe sur le front qui alterne le blanc et le bleu. Les parties blanches correspondent aux zones où la glace est la plus ancienne et ne s’est pas encore détachée. Les zones bleues ont été découvertes récemment, suite au décrochement des blocs de glace qui deviendront des icebergs. C’est un vrai spectacle de regarder ce glacier qui est en mode « surging », c’est-à-dire qu’il avance par gravité sur la mer en dépit des blocs de glace qui s’en détachent par réchauffement. L’observation de la naissance d’un iceberg n’est néanmoins pas une tâche aisée du fait du décalage entre l’image et le son.
Au-delà de ce point de vue magnifique, le plus impressionnant est en fait le bruit du glacier qui craque, ronronne, rugit et souffle. Peut-être est-il habité par un être fantasmagorique. Calle n’a pas su nous éclairer sur le sujet.
Après le déjeuner, nous reprenons les kayaks en direction du front du glacier pour une navigation au milieu des icebergs. Nous respectons toutefois une distance minimale de sécurité par rapport au glacier. Un moyen mnémotechnique de contrôle de la distance de sécurité, est de tendre le bras en visant le front du glacier, et de joindre à l’horizontale, l’index, le majeur et l’annulaire. L’épaisseur des trois doigts ne doit pas dépasser la hauteur du front du glacier.
En quittant le front du glacier, nous slalomons entre de nombreux icebergs de forme et de taille variées. Certains ont une couleur bleu translucide profonde avec une hauteur proche de huit mètres, soit environ trois étages. Sachant qu’il est communément admis que la partie émergée représente un cinquième du volume global de l’iceberg, il est impressionnant d’imaginer ce que représente le volume immergé sous nos kayaks.
La température remonte au fur et à mesure que l’on s’éloigne du glacier et que l’on se rapproche de l’îlot de Flint totalement recouvert de moraines. Le bivouac est prévu en face de cette île car nous pourrons facilement y trouver de l’eau. Le site est déjà occupé par une compagnie française, Grand Nord Grand Large, ce qui ne manque pas de faire réagir Miriam « too many bloody Frenchies ! ». Nous installerons notre campement cinq-cent mètres plus bas.
J’assure le tour de garde de cinq heures à sept heures pendant lequel j’aurai la visite de skuas curieux et particulièrement intéressés par les miettes que nous avons laissées à la suite du dîner. L’appât du gain leur fait presque oublier ma présence, et me trouvant à quelques mètres, j’ai pu les photographier en gros plan dans des postures insolites au milieu des poêles et des casseroles.
Comentarios