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FESTIVAL DE LA GACILLY
MARAIS

 

SHAH MARAI ET WAKIL KOHSAR > UNE HISTOIRE DOULOUREUSE

 

Shah Marai a débuté à l’AFP comme chauffeur et traducteur en 1996 avant de devenir officiellement photographe en 2001 quand les talibans furent chassés du pouvoir – il prendra ensuite la tête du bureau de Kaboul. En 2018, il meurt lors d’un double attentat suicide qui coûte la vie à 25 personnes. Arrivé après la première explosion, il est ciblé avec d’autres journalistes par un second kamikaze. Dans un pays bouleversé par l’occupation américaine et l’insécurité, ses images, pleines d’empathie pour son peuple, sont exposées aux côtés de celles de Wakil Kohsar.

Arrivé à l’AFP il y a neuf ans après avoir collaboré avec de nombreux médias afghans, Wakil Kohsar a pris la relève de son confrère Shah Marai. À la tête du bureau de Kaboul, il a notamment couvert la chute de la ville en août dernier. Ses photos de l’aéroport et des avions auxquels s’accrochent des silhouettes désespérées et celles montrant la tension et la panique des soldats américains ont fait le tour du monde.

Seule agence étrangère dont les bureaux sont encore ouverts à Kaboul, l’AFP continue de travailler dans des circonstances toujours plus dangereuses pour informer le monde sur un pays retombé aux mains de l’obscurantisme religieux.

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PAUL ALMASY > VOYAGE DANS UN ROYAUME ÉCLAIRÉ

 

Dernier roi d’Afghanistan, Mohammad Zaher Shah règne sur le pays de 1933 jusqu’à 1973. En 1959, il encourage la scolarisation et l’émancipation des femmes ; en 1964, il fait adopter une constitution inspirée de celle de la Ve République française. Sous son règne, son pays cherche à s’ouvrir au monde extérieur.

Le photographe français Paul Almasy nous a quitté en 2003 et a eu la chance de pouvoir visiter cette nation qui rêvait de sortir d’un système féodal. Celui qui a visité tous les pays de la planète, à l’exception de la Mongolie, naît à Budapest en 1906 d’un père juif et d’une mère aristocrate. Il débute sa carrière dans les années 1930 et couvre les prémices de la Seconde Guerre mondiale en Allemagne. Contrairement à la majorité des photoreporters de l’époque, Almasy sait qu’on ne raconte pas le monde qu’à travers les conflits et la violence mais, aussi, en s’attardant sur les difficultés sociales. En 1965, précurseur des problématiques qui deviendront centrales dans notre XXIe siècle, il publie notamment un vaste reportage sur le manque d’eau dans le monde.

C’est dans les années 1950-1960 qu’il découvre l’Afghanistan dont il rapporte des images qui semblent irréelles à l’heure où les talibans se sont à nouveau emparés du pays pour proclamer leur émirat islamique. Un regard historique et documentaire donc, nostalgique sans aucun doute, mais qui permet de mieux comprendre le passé de l’Afghanistan et – espérons-le – de présager de son futur délivré des griffes de l’obscurantisme.

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VÉRONIQUE DE VIGUERIE > ÉCLATS DE PAIX

 

La carrière de Véronique de Viguerie débute avec le XXIe siècle puisque c’est en 1999 qu’elle pose pour la première fois le pied en Afghanistan. Elle a 21 ans et tombe immédiatement sous le charme du pays. « J’étais stupéfaite par tout ce qui m’entourait. J’avais l’impression d’avoir fait un voyage dans le temps ; les hommes portant des turbans, les femmes en burqas… » Elle prévoit de s’y installer quelques mois ; elle vivra à Kaboul pendant trois ans.

Colombie, Irak, Somalie : Véronique de Viguerie connaît un succès retentissant très rapidement, se fait remarquer par les plus prestigieuses publications françaises et internationales et, photoreporter émérite, rafle toutes les récompenses : le prix Bayeux des correspondants de guerre, un World Press Photo, et plusieurs Visa d’or.

Véronique de Viguerie couvre les évènements en Afghanistan depuis le début des années 2000. Ses sujets ont bien évidemment traité des complexités d’un pays meurtri par deux décennies de guerres intestines et d’occupation militaire, mais elle a toujours su réaliser des pas de côtés pour montrer la vie quotidienne des hommes et des femmes qui y vivent : en parallèle de ses sujets exclusifs sur les talibans, elle est capable de documenter la pratique du ski par les Hazaras de Bamiyan, mais aussi de montrer la tendresse d’un couple de paysans, l’espoir et le rire des plus jeunes.

Ce sont ces éclats de paix que nous présentons cette année à La Gacilly : des fragments d’intimité, des poussières de quiétude, des instants de calme loin du tumulte de la guerre et de l’écume de l’actualité.

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HASHEM SHAKERI > TERRES DE SABLE

 

La plus vaste province d’Iran, Sistan-et-Balouchistan, est située au sud-est du pays. Limitrophe avec le Pakistan et l’Afghanistan, elle était considérée dans le passé comme un grenier à céréales et est mentionnée dans les textes historiques comme une région verdoyante, avec une abondance en eau et une terre riche et fertile nourrissant une civilisation remontant à 5 000 ans. Aujourd’hui, elle est l’une des zones les plus sèches du pays à cause de bouleversements climatiques sans commune mesure. 30 % de la population a quitté le Sistan-et-Balouchistan pour fuir le chômage et le désespoir que cette pénurie d’eau a entraîné.

Cette sécheresse représente un problème écologique, économique et social majeur en Iran. Elle a longtemps été l’un des objets du travail d’Hashem Shakeri. Photographe iranien vivant en Allemagne, ce jeune photojournaliste de 34 ans a déjà une carrière auréolée des prix les plus prestigieux comme la bourse Ian Parry, le prix Lucas Dolega, le prix UNICEF de la photo de l’année et la bourse Getty Images. Ses clichés sur l’effet de la pandémie et du confinement en Iran ont été mondialement salués et publiés dans le très prestigieux magazine The New Yorker.

Ses images de la sécheresse se remarquent par leur chromie particulière, leur composition millimétrée et des cadrages précis qui donnent à voir des scènes et des paysages presque lunaires. Autre série présentée : son travail autour des nouvelles villes satellites érigées et surgissant du désert pour héberger les Iraniens contraints de quitter Téhéran en raison de la flambée du prix des terrains et des conditions de vie de plus en plus difficiles.

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EBRAHIM NOROOZI > RÊVERIES TROMPEUSES

 

Un coup d’œil aux photos qui ont permis à Ebrahim Noroozi de remporter plusieurs prix au World Press Photo suffit pour comprendre l’incroyable polyvalence de ce photographe iranien, à la fois journaliste confirmé, grand défenseur de la cause environnementale, mais aussi plasticien à l’œil novateur. Jouissant d’une immense renommée internationale, son travail, entre son Iran natal, l’Inde ou encore l’Afghanistan, s’est retrouvé imprimé sur les pages des plus prestigieux magazines comme le New York Times, le Time ou le Washington Post : dans une série, il documente l’effrayante histoire d’une mère et de sa fille, toutes deux attaquées à l’acide par leur mari et père. Dans une autre, il pose un regard sans complaisance sur son pays, dénonçant la peine de mort par pendaison.

Mais ce caméléon de la photographie sait aussi brouiller les pistes, en s’imposant comme un artiste de l’abstraction, travaillant sur les éléments et la nature, maniant l’utilisation de la couleur jusqu’à la perfection. Deux séries d’Ebrahim Noroozi sont présentées à La Gacilly, dans un style photographique semblant tout droit sorti d’un rêve éveillé sur les méfaits du réchauffement climatique : l’une nous emmène au lac d’Ourmia, l’un des plus grands lacs salés au monde qui risque de bientôt disparaitre et dont les eaux, à l’arrivée de l’été, deviennent empourprées en raison des algues et des bactéries. Dans un second chapitre, le photographe s’intéresse à la relation entre les hommes et les ressources en eau de son pays : un tiers de l’Iran est recouvert de déserts et les sécheresses y sont de plus en plus fréquentes, entrainant d’importantes pénuries en eau.

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GOHAR DASHTI > FRAGMENTS DE MÉMOIRE

 

Gohar Dashti est née en Iran près de la frontière avec l’Irak, l’année où débutait une guerre entre les deux pays qui, jusqu’en 1988, allait déchirer la vie de milliers de familles. Dont celle de Dashti. « Ce conflit a eu une forte influence symbolique sur la vie affective de ma génération », explique la photographe et réalisatrice. Dans sa série Today’s Life and War, elle capture des moments illustrant une dualité : celle de la vie qui continue malgré les ravages de la guerre. « Dans un champ de bataille fictif, je montre un couple dans son quotidien : il représente le pouvoir de la persévérance, de la détermination et de la survie. »

Cette série photographique, qui date de 2008, a fait connaître Gohar Dashti de manière internationale et a été présentée dans de nombreux musées en Europe et aux États-Unis. Depuis ce travail intemporel qui conserve, 15 ans plus tard, une force évocatrice intacte, sa démarche a évolué, son style aussi, à la fois plasticien et documentaire, avec un regard sans cesse renouvelé. Preuve en est : les autres travaux présentés également à La Gacilly comme autant de témoignages sur notre relation avec notre environnement. Elle explique : « Les gens sont éphémères mais la nature est constante : elle sera là longtemps après que nous soyons tous partis. »

Des œuvres intelligentes et subtiles, qui utilisent la géographie comme un outil narratif à part pour raconter les relations entre les hommes et le monde qu’ils habitent. En exclusivité, nous exposons son dernier travail réalisé en collaboration avec l’artiste iranien Hamed Noori, Near and Far, achevé en 2022, kaléidoscope photographique inspiré de l’architecture, des paysages et des arts islamiques.

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GABRIELE CECCONI > LA TERRE DES MISÉRABLES

 

Comme l’arbre qui cache la forêt, cette histoire est celle d’une crise qui en dissimule une autre. En août 2017, les violences qui éclatent dans l’état de Rakhine, en Birmanie, forcent les Rohingyas (une minorité musulmane apatride et fortement persécutée par la junte birmane) à fuir vers le Bangladesh voisin. C’est l’une des crises humanitaires les plus fulgurantes de l’histoire : 655 000 réfugiés, dont la moitié sont des enfants, se déplacent en quelques semaines. Cinq ans plus tard, ce sont près d’un million de réfugiés qui sont massés dans des camps dans la région de Cox’s Bazar.

Le photographe italien Gabriele Cecconi a voulu raconter les conséquences écologiques et environnementales de cette crise. Car au-delà de la détresse des réfugiés, de l’horreur des récits qu’ils rapportent de la Birmanie, leur arrivée massive et précipitée a eu des conséquences sur les ressources naturelles déjà limitées de leur terre d’accueil. En survivant dans des conditions difficiles, les Rohingyas ont enclenché malgré eux plusieurs problèmes : déforestation, augmentation des conflits avec une faune sauvage elle aussi en manque d’espace, tensions avec les Bangladais vivant également dans la précarité…

Dans cette époque où la migration - qu’elle soit économique, climatique ou sociale – s’annonce comme l’enjeu majeur de notre siècle, le travail de Gabriele Cecconi est essentiel. Il nous permet de comprendre que les crises migratoires et le phénomène des réfugiés ne peuvent pas être traités de manière simpliste.

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