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COLLECTIF AFP > SURVIVANCES

 

Plus de 60 000 ans après leur installation sur l’île-continent, les peuples autochtones n’en finissent pas d’être déconsidérés sur leurs propres terres. En octobre dernier, un référendum a été largement rejeté par les électeurs australiens dont l’objectif, pourtant modeste, consistait à créer une Voix aborigène, à savoir un simple organe consultatif auprès du gouvernement et du Parlement, sans aucun pouvoir de décisions. Preuve en est que le pays est loin d’avoir fait la paix avec son passé colonial, comme le précise l’historien Romain Fathi, de l’université d’Adélaïde : « Que peut-on attendre d’une nation qui a encore l’Union Jack sur son drapeau, qui célèbre sa fête nationale le jour de son invasion par les Anglais le 26 janvier 1788. Ils ont peur qu’on leur prenne les terres qu’ils ont volées. »

Résultat : les Aborigènes, qui représentent aujourd’hui 3,5 % de la population australienne, sont dans les faits des citoyens de seconde zone : leur espérance de vie est près de dix ans plus courte que celle du reste de la population, et ils se situent au plus bas de tous les indicateurs économiques, qu’il s’agisse de pauvreté, de chômage, de mal-logement ou encore de mortalité infantile.

La force de l’Agence France-Presse et de son réseau de 450 photographes à travers le monde, c’est de faire émerger des actualités même si elles ne sont pas sous le feu des projecteurs, de montrer parfois ce qu’on ne voudrait pas voir, de combattre les idées reçues au nom de la vérité, de raconter des histoires sur nos sociétés en mouvement, de catalyser les émotions. Ainsi en est-il de ces peuples d’Océanie, et plus particulièrement d’Australie. Derrière les images folkloriques, colorées et exotiques prises par les photojournalistes se cache en effet une triste réalité. Cet enfer du décor peut se résumer parfois en une seule photo, comme celle prise par Anoek de Groot captant le regard perdu d’un enfant confronté à la misère dans un camp insalubre d’Alice Springs​.

 

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MATTHEW ABBOTT > FEUX ET CONTREFEUX

 

Entre juin 2019 et mai 2020, la saison des incendies de brousse en Australie fut tellement violente que les spécialistes l’ont renommé "Black Summer" : l’été noir. 24,3 millions d’hectares ravagés, plus de 3 000 bâtiments détruits, 88 milliards de dollars australiens en pertes économiques, 34 personnes décédées et 3 milliards de vertébrés terrestres tués : c’est l’un des événements les plus catastrophiques recensés dans l’histoire récente du pays.

Le photographe Matthew Abbott a immortalisé ce tragique événement et a remporté un prix au World Press Photo pour son image d’un kangourou courant devant une maison en flammes.

Devant cette situation, beaucoup de membres du gouvernement ont tenté de nier, ou d’ignorer, le lien entre le changement climatique et la hausse du nombre de feux, ainsi que leur ampleur. Mais dans un article publié dans la revue scientifique Nature, en 2021, un collège de chercheurs démontre que l’activité des incendies en Australie est fortement influencée par la grande variabilité climatique ; et que la modification du climat a le potentiel d’altérer encore plus la dynamique de ces incendies.

Face à cette réalité, et si la réponse se trouvait dans les pratiques ancestrales pratiquées par les Aborigènes depuis des temps immémoriaux ? Ce peuple indigène, dont la culture est l’une des plus anciennes sur la planète, a ravivé la pratique originelle du brûlage pour préserver et amender ses terres natales - et contribuer au développement de ses communautés. Des pratiques analysées et améliorées par des scientifiques qui les perfectionnent et les préconisent. Ainsi, au début de la saison sèche, ces hommes et ces femmes ne luttent pas contre les incendies. Ils les provoquent, afin de mieux les contrôler. Face à cette multiplication des forêts qui s’enflamment, le feu n’est alors plus seulement un problème : il devient également la solution.

 

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ADAM FERGUSON > BIG SKY

 

À partir de 1979, le photographe Richard Avedon passe ses étés à parcourir l’Ouest américain pour réaliser le portrait de ceux qui l’habitent. L’exposition de ce travail, en 1985, participe à faire vaciller les mythes de l’identité américaine du Far West, forgée par la littérature, la musique et le cinéma de l’après-guerre civile qui romançaient un monde dangereux peuplé de « sauvages ».

C’est précisément cette démarche qu’a voulu imiter le photographe australien Adam Ferguson, revenu dans son pays natal après avoir couvert les conflits (notamment en Afghanistan), dans sa série Big Sky. Le titre, « Un ciel immense », fait référence à une ambiance particulière dans le vaste territoire australien peu peuplé « Il y règne une sorte de calme étrange », prévient-il. « Et l’étendue du ciel devient incroyablement bruyante et poignante. » Son but ? Explorer les rapports complexes de l’histoire coloniale de l’Australie avec la crise climatique actuelle, la mondialisation et la vie quotidienne contemporaine dans les étendues rurales du pays.

« En tant qu’australiens, nous estimons que cette notion de brousse, d’agriculteur et d’étendue sauvage a construit notre nation », estime Adam Ferguson. « Et ça a été capital, au moins dans le développement de notre identité anglo-saxonne. » Mais selon lui, ce roman national s’éloigne de la réalité. Il évoque notamment les méthodes agricoles, héritées du modèle anglais, qui ne sont pas adaptées à l’écosystème australien.

Considérant que personne n’avait vraiment photographié l’intérieur de l’Australie comme Richard Avedon l’avait fait aux États-Unis, Adam Ferguson s’est lancé dans son sillage, considérant autrement ses terres d’origines. Et de les reconnaître comme appartenant encore et toujours aux Aborigènes et aux indigènes du détroit de Torrès – les deux ensembles des peuples autochtones d’Australie. Une forme de respect : « Nous reconnaissons que la souveraineté de cette terre n’a jamais été cédée et rendons hommage aux aînés, passés et présents. C’était, et ce sera toujours, une terre aborigène. ».

 

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MITCH DOBROWNER > DANS L’ŒIL DU CYCLONE

 

Lorsqu’il voit une tornade, l’Homme, normalement constitué, a pour réflexe de prendre ses jambes à son cou. Ou alors de s’enfermer dans sa cave. Mitch Dobrowner, lui, fonce droit sur elle. Là où ses collègues photographes animaliers traquent les oiseaux et les mammifères, lui préfère la compagnie des vortex, des supercellules orageuses et autre genre de tempête. « Elles prennent tellement d’aspects, de personnalités et de visages différents que je suis fasciné », explique celui qui a découvert la photographie à l’adolescence, mais qui a posé ses boîtiers, jusqu’en 2005, poussé par sa famille. « C’est observer ce que Mère Nature fait de mieux. Tout ce que j’essaye de faire, c’est de rendre justice à la beauté de ces événements ».

Une passion qui n’est pas sans danger. Mitch Dobrowner sait qu’il ne faut pas s’approcher trop près de ces tourbillons mais c’est en étant le plus près possible qu’il réussit à mieux les comprendre, et à les connaître. En 2010, dans le Wyoming, une tempête de grêle s’abat sur lui. « Je courais après elle, mais elle a fait demi-tour et c’est finalement elle qui s’est mise à me chasser. » Un incident qui ne l’a pas découragé puisqu’il continue de traquer sans relâche les orages et les intempéries les plus violentes possibles depuis bientôt deux décennies. « Je dois juste être au bon moment, au bon endroit, et parfois la nature me fait un beau cadeau », raconte celui qui a été mis à l’honneur par Google pour son utilisation de leur technologie dans ses quêtes météorologiques.

Son utilisation systématique du noir et blanc, pour faire ressortir les aspérités de ces tempêtes, lui vient de son admiration pour Ansel Adams – un autre maître de la photographie du paysage américain. Une démarche qui lui a valu d’être récompensé par l’Iris d’Or aux Sony World Photography Awards en 2012. Malgré ce succès et la réputation qui l’accompagne, Mitch Dobrowner refuse d’être appelé un « storm chaser », un homme qui chasse les tempêtes : « Je n’aime pas mettre les individus dans des cases. Je suis un photographe de paysage avant tout. »​.

 

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TAMARA DEAN > À LA RECHERCHE D'UN ÉDEN

 

En 2020, pour les Australiens, l’épidémie de Covid-19 venait s’ajouter à un autre traumatisme : celui des terribles feux de brousse du « Black Summer ». Comme beaucoup, la vie de Tamara Dean est alors transformée, bouleversée, interrompue. Pour échapper aux angoisses de cette période troublée, cette artiste, performeuse et photographe, a décidé de créer une série de clichés dans des jardins en utilisant son corps comme le « point lumineux » de ces paysages. « J’ai dû plonger mon corps dans l'eau glaciale », raconte Tamara Dean. « Je me suis enterrée dans des crevasses terreuses, j'ai enveloppé mon corps avec des fleurs… Et avec les abeilles qui vont avec ! » À la fin de chaque journée, son corps ressortait plein de bleus, d’égratignures et de morsures. Mais ces expériences la revigoraient d’une sensation physique ; celle, intime et puissante, d’être en vie. « Cette silhouette que vous voyez dans ces scènes, ce n’est pas seulement moi, mais la femme que je voudrais être. Celle qui peut bondir dans les airs, voler sur la cime des forêts et escalader les arbres. »

Tamara Dean a fait de sa signature un style où le corps est utilisé comme symbole. Comme un outil employé pour briser les barrières séparant l’humanité de sa responsabilité envers la planète. Une motivation qu’elle puise dans sa petite enfance, passée à proximité d’une réserve naturelle où elle a développé un amour profond pour la brousse australienne. En montrant les êtres humains au centre de ces fresques sauvages, elle les ramène à leur condition première : celle d’animaux au sens d’espèce vivante sur une planète et partie intégrante d’un écosystème sensible. « En en prenant conscience, nous pouvons commencer à nous voir comme faisant partie de quelque chose de plus grand, et non plus comme le centre de l’univers. »​.

 

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GAËL TURINE > LES ESPRITS DE LA FORÊT

 

Bienvenue au Bénin, ancien royaume de Dahomey et berceau du vaudou. Sur cette terre nichée au nord du golfe de Guinée, coincée entre le Togo à l’ouest et le Nigeria à l’est, la frontière entre les morts et les vivants est plus ténue que le profane veut bien le croire.

Qu’est-ce que le vaudou, exactement ? Une religion, au même titre que le christianisme et l’islam - eux aussi très développés dans la région. Ses pratiquants vénèrent un panthéon de dieux et de divinités mineures qui habitent les éléments de la nature allant d’une pierre à une cascade d’eau… ou un arbre. Il aura fallu du temps, de la patience, et l’autorisation des chefs spirituels du pays pour que Gaël Turine, sensible aux reportages de société, puisse accéder aux forêts sacrées de Mitogbodji, de Fâ-Zoun ou de Houinyèhouévé : des espaces fermés, des lieux de culte interdits aux profanes. Ici, la divinité sait que vous êtes là, mais vous ne la verrez pas : elle permet aux mortels de subsister et de s’épanouir, mais vit cachée. Et c’est grâce aux connaissances traditionnelles, aux tabous et totems, aux contes et légendes transmises à travers les générations que ces forêts sont restées protégées des activités humaines.

Reste que celles-ci ne représentent plus que 0,2 % du territoire et sont menacées par la pression démographique, l’extension des terres agricoles, et l’expansion des églises évangéliques. Entre 2005 et 2015, la superficie totale des forêts du Bénin a diminué de plus de 20 %, tandis que le taux de déforestation se poursuit à plus de 2 % par an, selon la Banque mondiale.

Cette situation complexe, Gaël Turine a voulu la comprendre, la documenter en se concentrant sur la survivance de ces rites liés à la seule existence d’une nature préservée. Si celle-ci disparaît, si ces sources de vie sont souillées, c’est tout un système de croyances, toute une culture qui s’effaceront à jamais.

 

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© 2017 Eric Poulhe Photographie

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